Beaucoup de monde parle aujourd’hui de la génération Y, des digitales natives, de la génération x etc. C’est à dire les différentes générations qui se retrouvent sur le web aujourd’hui et qui s’échelonnent de 12/13 ans à 45 ans ++.
J’ai vu ces trois générations passer dans le CDI où je travaille et j’ai donc vécu les difficultés et les débats liés à l’intrusion de l’informatique et surtout d’internet depuis 15 ans.
Aujourd’hui ces générations sont objets de discours. Ce discours est porté par un groupe de personnes, qui pour la plupart sont de la génération x. Et ce discours s’articule autour de deux axes : une révolution en cours ou un manque de méthodes.
Les digitales natives vont-il révolutionner le monde ou alors sont-ils une inconscience à venir ?
Moi, ce qu’il me semble surtout, c’est que l’école a abandonné ce terrain à la fois dans l’usage des outils mais aussi et surtout dans la formation culturelle et citoyenne de ces générations.
De qui parle-t-on ?
On en parle beaucoup de ces generation x, generation y, digitales natives… Les premiers, pour les plus vieux sont nés en 1967 (comment faire pour ne pas paraître trop largués). Ceux sont les enfants de la télé. Dans une fête, quand on chante capitaine flam, c’est eux (enfin nous, moi surtout)! Ils ont découvert Internet, ont useneté et listedediscuté comme des dingues, ont viré geek quand c’est devenu l’époque. Ils ont encore des réseaux et des câbles pleins les yeux, des serveurs, des protocoles…
Les Y ont 20-25 ans pour les ancêtres. Ils sont napsterien,s tendance WoW. Ils ont retenu le meilleur du peer (facile). Ils sont multimedia même IRL. Ils se foutent de l’effondrement de la bulle de 2001 et sont google addict. Ils ont des dreads (enfin certains) des pantalons qui bouffent…
Les digitales natives ne savent pas qu’internet a été inventé. Ils sont sur Facebook… Tous ! Mais aussi sur MSN, sur e-bay, sur…
… En même temps !
Et dans nos formations
Pendant ces 15 années où j’ai vu passer ces trois générations, l’évolution des pratiques a été flagrante. Il y a quinze ans il fallait passer son temps à expliquer le fonctionnement d’un logiciel (appropriation des outils) avant de se préoccuper de démarche. Le B-A BA consistait à indiquer que le carré gris en bas à droite était un bouton et que si on cliquait…
L’évolution technologique intuitive des outils en même temps que des pratiques multiples ont complètement changé l’optique la donne. Aujourd’hui, tout l’aspect commande du logiciel (ou du service) est intégré, par contre nous nous heurtons à un autre problème. Nous ne sommes pas légitime auprès des lycéens (et aussi un peu des étudiants que j’encadre à Limoges) pour proposer des formations autour d’internet.
J’ai l’impression que ce n’est pas un objet d’apprentissage, c’est une immanence et un lieu réservé ! Les formations que nous proposons sur la recherche d’informations ne conduisent pas à grand chose. Une fois la formation terminée, ils reprennent leurs anciennes pratiques. Alors que se passerait-il si nous proposions une formation qui s’appuie sur facebook !
Nous manquons de vocabulaire
Je crois que cet écart est du au fait que nous ne parlons pas de la même chose quand nous abordons l’internet. Internet, ça ne sert pas à rechercher de l’information, ou alors de manière anecdotique ! Internet, c’est comme la cour de récréation, les adultes n’y ont pas leur place !
En même temps les pratiques établies le sont en dehors de l’école. Difficile alors pour l’éducatif de se réapproprier quelque chose qui échappe très largement à son domaine de compétences.
En même temps, nous n’abordons pas internet avec le même prisme. Là où nous parlons méthodes et démarches, eux évoluent dans des espaces multiples, à très haute vitesse. Voir les plus et les moins chez Christophe ; voir aussi le témoignage de père de famille de Philippe Martin quand il observe son dernier enfant.
Donc pas étonnant que les diverses enquêtes (l’enquête belge sur la recherche d’information, l’enquête bretonne sur les doctorants) nous avertissent sur les difficultés à avoir une pratique réflexive sur l’outil.
Et dans le même temps, beaucoup de blogueurs voient en eux l’avenir radieux des organisations. Ils nous les décrivent positivement comme multitâches, désinvoltes, ne voulant pas s’ennuyer, mettant au premier plan leur travail… (du pain béni pour les DRH à condition de prendre en compte leurs besoins).
Oui mais… Dans tous ces discours (et je suis complètement d’accord avec le premier), il y a quelque chose qui me gêne. C’est nous qui parlons, et nous c’est la génération x. Et quand nous parlons, nous le faisons en enfant de la télé qui avons analysé comment nous nous sommes approprié puis désintéressé de cette lucarne pour jouer sur de nouveaux écrans. nos discours oscillent donc entre fascination et analyse critique référant au monde documentaire dont nous sommes issus.
J’ai parfois l’impression que le web, et particulièrement le 2.0, du
moins ses commentateurs avertis, est aujourd’hui la propriété d’une
classe intermédiaire qui vient du monde du livre et qui a la culture nécessaire pour pouvoir évoluer dans ce monde là.
Mais cette génération va être balayée par quelque chose qui arrive, ce que les contempteurs appelle la génération Y. Et personne ne peut prétendre savoir ce qui va se passer. Cela me fait penser aux textes de lovecraft comme la couleur tombée du ciel. Quelque chose arrive mais on n’a pas le langage pour le décrire, alors on utilise imparfaitement des images connues mais qui sont fausses.
Et maintenant une intuition : un besoin de culture
Il y a quelques temps j’ai commenté un billet de Jérôme Bondu intitulé Internet participatif : aussi intelligent que le cerveau d’une mouche commentant lui-même les arguments d’Andrew Keen sur le « mythe de l’amateur ».
Il revient notamment sur l’absence de culture que démontre le web. C’est un argument que je trouve très juste. ma veille me conduit à suivre des fils rss de gens qui ont une culture. Et beaucoup de ces gens défendent parfois l’idée de l’inutilité de la culture (ce n’est absolument pas ce que dit Jérôme dans son billet). Mais pour pouvoir faire ce que ces gens font, il faut une culture importante.
Revenons sur la récente enquête belge : cette génération aurait 7,65/20 en recherche d’information. Et faire une recherche d’information requiert une culture nécessaire et pas seulement de savoir manipuler une interface technique ou sociale. On ne peut pas faire une recherche si on n’a pas identifié un besoin d’information et pour identifier un besoin d’information, il faut une matrice culturelle.
Pour moi cela revient à avoir un terreau de connaissances sur le sujet de recherche et une vision globale de ce qu’est l’information, une réflexion sur le monde qui conduisent cette recherche et qui permette notamment de faire le tri, un regard critique sur le monde qui nous entoure, une éthique et une vision politique de soi, des autres, de la Cité.
Alors que penser ? Est-ce que les critères proposés sont obsolètes et inapplicables à cette nouvelle génération ? Cette note de 7,65 ne représenterait alors que le mode de pensée du vieux monde ?
Et maintenant une intuition : un besoin de citoyenneté
Pour dépasser ce clivage entre usage réflexif vs fluidité d’usages je crois qu’il faut revenir à l’éducatif. Et qui dit éducation, dit vision politique de la société que nous voulons, nous parents (et non plus génération x) pour nos enfants. Arrêtons de segmenter et reprenons la main que nous avons laissé aux medias.
J’ai aussi l’impression que les enjeux qui priment aujourd’hui nous conduisent à privilégier l’efficacité au détriment de l’éthique. C’est un fait que l’école tend à devenir un lieu d’apprentissage centré sur le couple compétence/connaissance et contre celui du savoir/culture. Ces apprentissages-ci étant renvoyés dans la sphère familiale et donc renforçant l’héritage culturel.
Il ne peut y avoir d’éthique sans une solide culture personnelle, alors qu’on peut avoir des travailleurs efficaces sans culture.
Je ne sais que penser ! Réflexions en cours.
Webographie
http://www.vaninadelobelle.com/Analyse-sur-la-generation-X_a1067.html
http://philippemartin.soup.io/post/7177221/Les-digital-natives-la-g-n-ration
http://www.enseignons.be/actualites/2008/05/25/les-jeunes-incapables-de-sinformer-sur-le-net
http://www.jobetic.net/Sur-le-web-2-0,-les-de-30-ans-parlent,-les-de-30-ecoutent-_a1627.html
http://bibliothecaire.wordpress.com/2008/10/07/google-generation
http://www.newzy.fr/management/cadres-lemergence-de-la-generation-dolto.html
http://www.epn-ressources.be/dominique-pasquier-sociabilites-adolescentes-et-technologies-numeriques
http://urfistinfo.blogs.com/urfist_info/2008/05/digital-natives.html
http://www.inter-ligere.net/article-20815657.html
http://knowledgemouv.blogspot.com/2008/06/un-billet-de-jrme-bondu-intitul.html
7 Replies to “Gen x, Gen y, digitales natives”
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c’est là où je suis plus dubitatif. Une culture est quelque chose de commun. On peut ne pas tout savoir (je suis pas top en peinture et en musique je suis une brèle par exemple) mais je crois qu’il y a quand même iune culture commune à tous. Alors comment avoir une culture commune quand l’échelle est la planète ? j’avais un prof de contemp, robert Ilbert (à aix, y’a longtemps) qui disait qu’il fallait avoir un plus petit commun dénominateur pour vivre ensemble. A l’échelle mondiale, il est clair que c’est assez compliqué à trouver et c’est peut être pour ça aussi que l’on passe au couple compétences / connaissances car on ne sait plus très bien ce que doit être notre culture et donc on passe au niveau infra.
Concernant l’apprentissage tout au long de la vie, on est toujours, de mon point de vue, sur un apprentissage compétences / connaissances. On sait par exemple qu’un diplômé de l’enseignement supérieur qui arrive sur le march du travail va voir ses acquis se déprécier rapidement car, il y a obsolescence rapide des Comp/conn.
Une culture ne se déprécie pas, elle s’enrichit. Et cette culture que l’école dispensait est en train de disparaître. Cet apprentissage repose désormais sur la famille et on sait que les familles ne sont pas égale devant la culture.
Franchement, je crois vraiment que l’un des gros soucis que l’on rencontre et que l’on va rencontrer dans l’avenir c’est l’absence de culture commune, mais je peux me tromper .
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je crois que le PPCD (plus petit commun dénominateur) va se créer. il est souvent considéré les générations comme des blocs s’opposant. C’est faux ! les digital natives et les migrants peuvent s’inter-connecter. Les résultats vont créer des sédimentations et après la « levure » va s’accroitre. Evidement dans cette culture des sous-ensembles il n’y pas des absorptions ou des fusions mais des apports partiels qui créent les nouveaux ensembles.
La culture des frictions des X, Y et natives n’existe pas encore en éléments consolidés mais à l’état embryonnaire. Vouloir présenter ou cartographier maintenant cette culture est illusoire et introduirait un biais majeur : le parti-pris du prisme d’observation avec « midi à notre porte ».
Enfin gérer les paresseux (refus de l’effort et de la persévérance) et les dispersés chroniques est épuisant pour les DRH ET managers!
Les causes ne sont pas les outils ou les usages mais l’absence d’apprentissage de méthodes et de bonne pratiques. Je fais le test du support en cours. L’exercice consiste à déterminer d’après une liste d’objectifs et de contraindre le meilleur support/situation donnée. le livre papier ou le carnet+crayon » sont souvent retenus au lieu du ebook et du pc (à priori au début du test).
La plupart des élèves n’apprennent plus à sélectionner car cela est considéré comme « acquis » mais pas enseigner.. du coup la plupart subissent un diktat de l’outil et ne savent pas s’en écarter ou le critiquer.Fatalisme.
Quant à l’apprentissage continu….l’approche reste encore très académique sans vraiment de moyens de mesures et valorisation.
ps : la culture générale est une épreuve supprimée cette année des concours catégories B et C.
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Merci Florence, je sais pas encore répondre à tes deux dernières questions. Je vais y réfléchir. et reviens vite vers toi.